Voici un texte bien intéressant de Marie-Louise Lacroix paru dans LeDevoir:
Radio-Canada : Le Culte de l'Inculte
Marie-Louise Lacroix
Depuis des semaines, faute de temps, je reportais de jour en jour le petit mot que je désirais acheminer à Radio-Canada.
Or M. Beaudet m'enlève littéralement les mots de la bouche par le biais de sa lettre publiée tout récemment dans Le Devoir ( http://www.ledevoir.com/2006/06/27/112436.html ). Et je l'en remercie. Car elle me donne en quelque sorte le ressort pour ajouter ce qui suit.
Qu'est donc Radio-Canada, à la fin?
De la « Variété » comme rapport fondamental sinon exclusif au monde (comme disent les philosophes), de la publicité en bloc à toutes les huit minutes, des téléséries et des films étatsuniens dignes de ces chaînes américaines d'expression française nommées TVA ou TQS, sans compter, of course et enfin, la Propaganda-Canada - tantôt active, tantôt implicite, mais jamais vraiment subtile. Par mésinformation, par dérision, par abstention, par désinformation. Bref, c'est selon.
Incidemment, à ce dernier titre, on aura tous été témoins, à la faveur de la fin de semaine du 24 juin (radio, télé, internet, Alouette !), du mot d'ordre qui a été donné clairement par la direction de l'Organisation, de manière à ce que tous les journalistes et «rapporteurs» éliminent systématiquement la locution «Fête nationale» de leurs reportages. Et ce, afin de troquer la dangereuse - voire l'immonde - formule (et pourtant très officielle depuis sa promulgation par l'Assemblée nationale sous le gouvernement de René Lévesque, il y a de cela maintenant... presque trente ans) pour la débile, surannée et indélibile appellation ethnico-religioco-canado-française de : «Saint-Jean-Baptiste».
Exit ! en Radio-Canada - à l'instar de Gesca d'ailleurs, ainsi que de nombreux commerçants qui se comportent avec la fierté... des bons vieux marchands de tapis - cette Fête nationale des Québécois ! C'est redevenu la commémoration informe, négatrice et déliquescente d'une vague «Canadienne-Françaiserie», comme l'écrivait avec justesse le philosophe Jean-Luc Gouin il y a quelques années.
Autrefois véritable "fanne" de Radio-Canada (chaînes radio et télé confondues), j'ai progressivement délaissé ces antennes depuis une bonne décennie - antennes que pourtant, et à son grand dam, la contribuable que je suis finance de ses taxes et de ses impôts. Même «La Première à la carte», par le canal cybernéen duquel on peut saisir en baladodiffusion (les Français, «France Culture» comprise, qui au reste ne comprennent plus la langue de Molière depuis déjà plusieurs années, disent plutôt «podcaster») le meilleur du jour (ce n'est pas moi qui le dis, je vous l'assure) de la première chaîne radio, même «cette crème de la crème» ( !), dis-je, nous est présentée par des "poupounes" style «Radio Rock-Détente» ou «Radio Énergie», toute émues par le timbre de leur propre voix, d'abord, et préoccupées, ensuite et sans plus tarder, à ventiler le propos de commentaires vains ou insignifiants sur le ton sulfureux d'adolescentes en mode séduction.
Décidément, et derechef, il y a du Sylvain Lafrance - peut-être même, allez savoir, du Guy Fournier - là-dessous.
Autrefois amoureuse (rien moins) de Radio-Canada, cette chaîne d'État (car elle n'est plus simplement «publique» depuis longtemps : depuis qu'un certain Tit-gars de Shawinigan, en l'occurrence, s'en est occupé personnellement, quoi) a fini par m'ennuyer profondément - tout en un et en continu - par son insignifiance, son National Unity Ideology et («commerciaux» et programmation commerciale ici conjuguées dans la plus licencieuse des promiscuités) sa «pubellisation».
Mais aujourd'hui, elle ne m'ennuie plus (d'ailleurs, je ne l'écoute ni ne la regarde plus, sauf à l'occasion, pour constater... que rien ne change, bien au contraire). Non elle ne m'ennuie plus.
Elle me répugne.
Jusqu'à l'horreur.
Or, rétrospectivement, je constate que cette nausée a pris possession de moi, progressivement, et désormais jusqu'à l'insupportable, depuis que les Robert Rabinovitch et les Sylvain Lafrance (d'ailleurs embauchés par le très honnête Tit-gars de la Mauricie ci-haut non-nommé, et je ne parle pas de l'auteur du «Tour de l'Île», de «Mon Fils» ou de «L'An 1») tiennent les rênes du réseau entre leurs mains tueuses de grandeur, de beauté, de noblesse et d'intelligence.
Radio-Canada.
Source: http://www.ledevoir.com