Mieux vaut tard que jamais
François Houde
Le Nouvelliste
Trois-Rivières
Les chiffres sont sans appel. Sur les ondes de TVCogeco, la télévision communautaire du câblodistributeur Cogeco, l’émission la plus écoutée dans la région est Chanson Via Country animée par le chanteur country Viateur Caron avec plus de 18 000 spectateurs.
L’émission qui arrive en deuxième place, Tribune municipale, attire à peine la moitié de ses auditeurs. Chanson Via Country est retransmise sur l’ensemble du réseau de Cogeco à travers la province et rejoint 75 200 auditeurs sur une base hebdomadaire, de loin le plus gros succès du réseau communautaire.
L’émission existe depuis 2000 et l’auditoire est en constante progression. À ses débuts, l’émission durait une heure et elle a été portée à 30 minutes quand, en 2003, Cogeco a suggéré qu’elle soit diffusée à travers tout son réseau provincial. Depuis, à chaque semaine des membres du public appellent Viateur Caron à la maison pour se plaindre que l’émission est trop courte mais ils n’ont jamais été aussi nombreux à l’écouter.
L’émission, c’est son bébé. Un truc tenu à bout de bras par lui et ses proches: sa conjointe Nicole ainsi que sa fille Patricia et son mari Steve Doyon. Ce sont eux qui montent les émissions, en assurent les enregistrements, choisissent les invités, etc.
Le secret du succès? Viateur Caron lui-même, bien sûr, avec son indomptable bonhomie, sa simplicité, son naturel. Que voulez-vous, il aime les gens et la vie. Passionnément dans les deux cas. Et puis, il y a Les p’tits coups de coeur de Viateur, un segment de l’émission.
«Là, au milieu de l’émission, je chante des chansons souvenirs de nos pionniers du country au Québec: Paul (Daraïche), Marcel (Martel), Lévis (Bouliane), explique Viateur (Caron). Ça, ça fait sonner le téléphone, tu croirais pas ça!»
À côté de l’appareil téléphonique de la résidence, il y a un cahier noir avec les coordonnées de chaque invité passé à l’émission au cours de ses huit ans. (La huitième saison ne sera diffusée qu’à l’automne prochain mais les 14 émissions sont déjà enregistrées.) Les téléspectateurs voient à l’écran le numéro de téléphone des Caron et c’est par eux qu’ils sont mis en contact direct avec les invités qui peuvent ainsi leur vendre leurs albums.
Un milieu marginal
Ici, il importe de préciser que le country traditionnel est un milieu spécial. Les artistes country francophones comme Viateur Caron vendent eux-même leurs albums. Par téléphone, grâce surtout à l’émission Chanson Via Country et aussi lors de prestations dans les différents festivals country de la province parce que les gros magasins de disques refusent de le vendre. Pas assez vendeur, disent-ils.
À une certaine époque, Caron a fait jusqu’à 70 festivals par année, les fins de semaine, essentiellement. Aujourd’hui, à 59 ans, il se contente d’une trentaine. N’empêche, pour quelqu’un qui est à la tête de sept compagnies différentes dans le domaine de la construction et de la rénovation dans la région et qui brasse des chiffres d’affaires annuels dans les millions de dollars, c’est plutôt lourd. Mais Viateur n’a pas les deux pieds dans la même botte de cowboy.
Pendant huit années consécutives, Viateur Caron a loué un espace sur la rue principale à Saint-Tite où, pendant les dix jours du festival western, il a joué sa musique de 9 h à 17 h.
«Le meilleur moyen de se faire connaître des amateurs de country québécois, soutient-il. Comme on ne joue pas à la radio et qu’on n’est pas en magasins, c’est la seule façon de se faire connaître du public. Ce que les gens aiment dans le country, ce sont des chansons qu’ils connaissent déjà et qu’ils aiment. En chantant neuf heures de temps dans la rue pendant tout le festival, ils finissaient par bien connaître mes chansons.»
L’anecdote n’est pas anodine parce qu’elle dessine un peu l’homme et sa démarche. Il ne faut pas avoir peur de mouiller sa chemise pour son art et adorer le monde pour se taper pareil régime. Voilà Viateur Caron. Pas pour rien qu’il émaille ses spectacles d’histoires et d’anecdotes comiques qu’il raconte à son monde. «À Rimouski, j’ai fait un spectacle il n’y a pas longtemps. En deux heures, j’ai chanté 14 chansons. Le reste, c’était des histoires. Les gens étaient tordus de rire.»•
Source: Le Nouvelliste, via http://www.cyberpresse.ca